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Lettre ouverte à Eric Ciotti

Lettre ouverte à Eric Ciotti au sujet de l’école à la maison

Le 27 avril dernier, le député Eric Ciotti (LR) a déposé un projet de loi visant à interdire l’école à la maison, sous prétexte de lutte contre l’islam radical. Ce n’est pas la première fois qu’un tel projet de loi liberticide surgit : déjà, en 2013, j’avais écrit un billet ici même, projet qui avait été par la suite abandonné. Je suis concerné : avec mon épouse, nous pratiquons l’école à la maison depuis 2012. Avec succès, d’après notre inspecteur d’académie (!). Cette fois-ci, ce projet est soutenu par de nombreux députés Les Républicains. Vous pouvez signer la pétition que j’ai lancée à cette adresse.

Monsieur le Député,

J’ai l’honneur de vous écrire au nom des 13.685 signataires qui ont signé, à cette heure, la pétition demandant le retrait de votre projet de loi n°3704 du 27 avril dernier, et que j’ai lancée il y a quelques jours. Vous en trouverez le texte ici :

http://www.citizengo.org/fr/34417-le-retrait-du-projet-loi-ndeg-3704-du-27-avril-2016

En effet, pratiquant l’école à la maison pour mes enfants, comme bien d’autres familles, nous ne pouvons accepter que soit supprimé ce droit inaliénable des parents à éduquer leurs enfants comme ils le désirent. Nous acceptons que soient, si besoin, multipliés les contrôles nécessaires de la part des autorités publiques, mais nous voulons préserver ce droit, au nom du bien de nos enfants, de l’intérêt commun et de la liberté.

Nous sommes donc décidés à continuer cette campagne tant que ce projet n’aura pas été abandonné. Nous avons reçu pour cela le soutien de plusieurs élus, dont du député Jean-Frédéric Poisson (LR).

Aussi, je serais heureux de pouvoir vous rencontrer prochainement à l’Assemblée nationale pour m’entretenir avec vous sur ce sujet.

En espérant que vous donnerez une suite favorable à cette requête,

et en vous remerciant par avance,

Veuillez, recevoir, Monsieur le Député, l’expression de mes salutations respectueuses.

Jean-Baptiste Maillard

Deux ans sans blog, quel bonheur !

Deux ans sans blog, quel bonheur !

Un expérience à vivre…

Eteindre provisoirement mon blog, sur une longue durée (presque 2 ans, quand-même !) a a été pour moi une vraie bouffée d’oxygène. Je conseille cette expérience à tous les blogueurs ! J’ai pu me reposer en Dieu et sur Lui. Plus de prière, plus de Parole de Dieu, plus de louange, moins de bla-bla, moins de paroles en l’air, moins de fatigue, quel bonheur ! Cette petite ascèse médiatique m’a donc fait le plus grand bien. Tant mieux pour tous les sujets sur lesquels j’aurais beaucoup aimé surfer : je ne les ai pas malmenés mais au contraire offerts, en prière, au Seigneur !

Pour plus de liberté…

Exit la soumission au dictat de l’actualité, toujours chaude et si vite dépassée (le temps médiatique se raccourcit de plus en plus). Exit la nécessité, vendue comme absolue, de mettre son blog à jour une à deux fois par semaine ! Exit les tentations des coups de gueule pas toujours parfaitement ajustés (;-)).

En avant !

Aujourd’hui le temps est donc venu pour moi de reprendre la plume, comme je l’ai entendu ce matin à la louange :

“Personne n’allume une lampe pour la mettre dans un lieu caché ou sous le boisseau, mais on la met sur le chandelier, afin que ceux qui entrent voient la lumière.” Luc 11,33

Rassurez-vous, je n’ai pas chômé depuis 2014 ! Je vais donc pouvoir vous parler de mes nouveaux projets (blog professionnel : stratégies de com‘), de mes aspirations (nouvelle association : Lights in the Dark), de nos initiatives (La Résurrection du Christ), bref, de mes envies ! Avec Jésus plus que jamais premier dans ma vie, du moins je l’espère !

Et donc : priez pour moi ! Merci !

Ps : pour commencer, j’ai décidé de rouvrir mon blog avec ce billet sur un thème qui m’est cher, au sujet d’un nouveau projet de loi visant à d’interdire l’école à la maison, que je pratique avec mon épouse depuis 4-5 ans déjà…

Ainsi soient-ils 2 : réagir ?

Ainsi soient-ils

« A force de tout voir on en vient à tout supporter, à force de tout supporter, on en vient à tout accepter. » Saint Augustin 

(Attention : ce billet n’est pas une critique de la série : pour cela, lire celle publiée sur Ainsi soient-ils.com  – ni de révéler encore tous ses secrets 😉 ).

En juillet 2012, avec une bande de copains à l’affut des nouvelles séries, nous avons vu arriver Ainsi soient-ils. Aussi nous avons cherché à voir la première saison dans son intégralité, avant sa diffusion à la télé, bien entendu. Puis, ayant discerné qu’il fallait réagir, nous avons mis en ligne, juste avant le 1er épisode, un site pour répondre à toutes les questions soulevées par la série. Par chance, www.ainsisoientils.com était dispo. 😉

Nous avions pris soin, préalablement, en lien avec quatre séminaires, de faire travailler des séminaristes, des prêtes et des professeurs, afin d’avoir immédiatement un grand nombre de contenus à proposer. Bref, une véritable opération de com’, menée dans le plus grand secret.  Le jour J, tout le monde a été très surpris. Et la presse en un peu parlé : Nouvel Obs, Direct matin, Le Parisien, etc. De quoi faire passer le message qu’il manquait vraiment la joie et cela avait l’air largement bidonné ! Cependant, beaucoup de catholiques sont restés passifs, voire n’ont pas voulu soutenir notre initiative (pour ne pas dire plus). Alors, je voudrais ici reposer* la question franchement : fallait-il réagir ?

Quand parviennent des séries de ce genre, trois tentations s’offrent aux chrétiens.

  1. La tentation de la “riposte guerrière”

Clairement, c’est être sur la défensive voire l’attaque, jusqu’au procès pour diffamation (ici, certains y ont pensé). Il faut dire que beaucoup de dialogues se prêtent à confusion, tout comme le faux-vrai-site Internet des Capucins monté par Arte en mode années 2000. Il serait donc alors question de s’en prendre frontalement aux créateurs de la série et à la chaîne qui la diffuse, ou même à ceux qui ont conçu les affiches (accessoirement, l’agence de la campagne de 2012 d’un certain M. Hollande). Seulement, tant que la série est à l’antenne, c’est très risqué, surtout qu’il s’agit « d’une fiction ». Et Arte cherche manifestement la polémique. S’il fallait faire un procès « parce qu’on ne peut pas tout accepter » (le cathobashing ayant ses limites), c’était dans l’espace des deux années entre la 1ère et la 2ème saison, mais pas au moment des diffusions. En outre, ce type de réaction n’a le plus souvent pour effet que de renforcer le sentiment d’une Eglise « feutrée et pesante », pour reprendre l’expression d’un journaliste des Inrocks expliquant qu’Ainsi soient-ils est fidèle à la réalité. Qui plus est, le public a horreur d’être pris à témoin. Ce n’est donc pas la bonne approche.

  1. La tentation de l’autruche

Comme le disait récemment un évêque sur un tout autre sujet, « ne rien faire, ne pas réagir, est la position la plus confortable ». La deuxième tentation est donc celle du repli sur soi. On s’enferme et on attend que l’orage médiatique soit passé. Après tout, ce n’est qu’une série. Je l’ai aussi entendu dans la bouche de plusieurs journalistes : « il vaut mieux pas leur faire de pub ». Ce à quoi l’un de nous a répondu « Pour la pub, il faut croire qu’ils ne nous ont pas attendu, sur les bus et dans les gares !… ». Avec en moyenne 1,4 million de téléspectateurs lors de la saison 1, notre site Ainsi soient-ils, malgré ses milliers de visites, surfe bien sur la vague de l’audimat mais, c’est sans véritable comparaison possible.

  1. La tentation du “revers de main”

La troisième tentation est celle de s’intéresser vaguement au problème. On regarde rapidement les deux premiers épisodes « pour se faire une idée ». Et ensuite, on publie une critique : c’est un peu comme donner son avis sur un film en n’ayant vu que les 10 premières minutes ! Pourtant, beaucoup ont commis cette erreur du « chèque en blanc ».

Autre problème spécifique à cette série : à chaque saison, tout bascule au 3ème ou 4ème épisode. (La chaîne aurait d’ailleurs organisé des projections privées, avec des personnalités de l’Eglise, pour les seuls deux premiers épisodes…). Même le Vatican est tombé dans le panneau : le festival Mirabile dictu, sous le haut patronage du Conseil pontifical pour la culture, avait accordé à la première saison d’Ainsi soient-ils le prix 2012 du film international catholique, avant de le retirer quelques semaines plus tard, sur l’intervention de « on ne dira pas qui »… (Ce qui n’a pas empêché Arte, pour la sortie des premiers DVD, de l’indiquer sur la pochette !). Là encore, ils n’avaient vu que les deux premiers épisodes…

Bref, on voit bien, ici, qu’il revient aux communicants, journalistes, bloggeurs et twittos cathos de prendre le sujet à bras le corps. Car en tombant dans les trois premières tentations citées plus haut, on ne répond pas à la recommandation de l’apôtre Pierre dans sa première lettre : « Soyez toujours prêts à répondre de l’espérance qui est en vous ». Il prend soin d’ajouter « faites-le avec douceur et respect ». Lors du Da Vinci Code, l’Opus Dei avait mis en œuvre une stratégie très intelligente, pour « faire de la limonade avec du citron ». Et respecter la règle des trois « p » : être positif, poli, professionnel. L’œuvre de Dieu en avait même profité pour refaire entièrement son site Internet.

Ainsi soient-ils

Le Parisien. Contacté par Arte pour devenir partenaires de la saison 2. A la suite de l’article sur notre initiative lors de la saison 1 ?

Ici, ce n’est plus l’Opus Dei qui est la cible de critiques explicites ou implicites souvent injustes voire même blasphématoires, mais l’Eglise elle-même, à travers ses arcanes (les séminaires, les évêques, le CEF, jusqu’au pape lui-même, qui réapparaît bientôt à l’écran). Il faut donc faire ce que les pros de la com’ appellent le « reframing » : il s’agit de chercher « la bonne intention » derrière l’orientation des sujets, c’est à dire à quels thèmes les personnes peuvent-elles être sensibles, pour communiquer directement dessus. Exemple : « faute de mariage, les prêtres sont des frustrés ». On repose le sujet autrement : L’Eglise est-elle contre le sexe ?

Ainsi soient-ils - Libération

Un article de Libé, avec la pub en arrière-plan.

La preuve que cela commence à fonctionner – mais nous ne sommes pas au bout de nos peines : sur notre site en éclairage à Ainsi soient-ils, nous avons reçu ce message : « C’eût été encore mieux si vous répondiez aux incompréhensions des non-croyants sur l’Eglise que cette série révèle. Cette série montre ce que l’on perçoit de l’Eglise (…). Je fais partie des gens pour qui l’Eglise est un mystère et alors que votre page est bien référencée, je ne trouve pas de réponse. »

C’est donc aux catholiques de se saisir de cette occasion pour répondre aux questions posées par les internautes, dans un but d’évangélisation, mission première… de l’Eglise.

Et de se faire caisse de résonance de toutes les aspirations de l’homme moderne qui cherche Dieu, y compris sur les réseaux sociaux. Là aussi commence l’évangélisation du continent numérique, au delà des intentions réelles ou supposées des auteurs. Avis aux amateurs !

Pour participer :

 

* Cf mon premier billet ici en 2012.

 

Jean-Paul II

Pourquoi j’ai appelé mon fils Karol

Jean-Paul II

Lorsque j’ai rencontré celle qui allait devenir ma femme, il y a huit ans déjà, nous avons tout naturellement évoqué les prénoms que nous voudrions pour nos enfants…

–  Si tu as un garçon, tu l’appelleras comment ? lui ai-je demandé.

– Karol !

– Ça alors, moi aussi ! lui ai-je aussitôt répondu…

Lorsque nous avons attendu notre premier enfant, nous avons donc su, dès le verdict de l’échographie, que notre aîné s’appellerait Karol. Quelle chance de s’être entendus si vite ! 😉

Bien sûr, ce choix n’est pas un simple hasard : issus de la « génération Jean-Paul II »,  nous avons vécu nos vingt premières années sous ce pontificat.  Pour ma femme, Jean-Paul II a été un père, au sens propre. Pour moi, une bouée, un phare, un autre père. Quoi de plus naturel que de donner à ses enfants le nom d’un père ou d’un grand-père chéri de qui l’on a beaucoup reçu ?

Je me souviens particulièrement avoir croisé son regard au JMJ de 1997. Regard d’une telle intensité… Ces journées me donnèrent pour la première fois envie d’évangéliser dans la rue, dans le métro, certains conducteurs disant eux-mêmes : « il est devenu vivant ! ».

Et puis, les JMJ de Rome, en 2000. Cette veillée inoubliable de Tor Vergata (vidéo), où le pape était en parfaite osmose avec le million de jeunes présents, tel un père avec ses enfants, répondant à nos ovations en agitant joyeusement les bras.

Je me souviens particulièrement de son discours cette nuit-là, sur le thème « Et pour vous, qui suis-je ? » (Mt 16,15) (-peut-être parce que mes amis me demandèrent de répéter à haute voix la traduction de ma petite radio sans haut-parleur…) Il nous demandait alors d’aller « à contre courant » pour suivre le Christ :

« Chers amis, aujourd’hui encore, croire en Jésus, suivre Jésus sur les pas de Pierre, de Thomas, des premiers Apôtres et témoins, exige de prendre position pour lui, et il n’est pas rare que ce soit comme un nouveau martyre : le martyre de celui qui, aujourd’hui comme hier, est appelé à aller à contre-courant pour suivre le divin Maître, pour suivre «l’Agneau partout où il va» (Ap 14, 4). Ce n’est pas par hasard, chers jeunes, que j’ai voulu que pendant l’Année sainte on fasse mémoire, près du Colisée, des témoins de la foi du XXe siècle. »

Je me souviens encore lorsqu’il est entré dans la Vie. J’avais trouvé l’attente insupportable et j’étais allé au cinéma. Après le film, dans le RER, j’avais allumé mon portable et appris la nouvelle. J’ai eu la gorge subitement nouée. C’était pour moi la perte brutale d’un être très cher, avec qui j’avais vécu, et je m’y étais mal préparé. De plus, je n’ai pu me rendre à son “enciellement terreste” à Rome… un vrai traumatisme !

Mais le souvenir de Jean-Paul II n’est pas resté une simple nostalgie. J’ai commencé à me plonger dans sa vie, ses écrits, son oeuvre. En 2009, lorsque j’ai publié mon livre « Dieu est de retour, la nouvelle évangélisation de la France », j’ai voulu rappeler comment, encore cardinal, il avait suggéré au pape Paul VI de reprendre à son compte les conclusions du 4e synode des évêques sur l’évangélisation dans le monde moderne, ce qui donna  précisement naissance à l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, texte de référence sur l’annonce de la Bonne Nouvelle dans nos sociétés démontées. N’est-ce pas le pape François qui en parle dans son encyclique Evangelii gaudium au paragraphe 123 ?

« Dans la piété populaire, on peut comprendre comment la foi reçue s’est incarnée dans une culture et continue à se transmettre. Regardée avec méfiance pendant un temps, elle a été l’objet d’une revalorisation dans les décennies postérieures au Concile (lancé par un certain Jean XXIII ! – ndJBM). Ce fut Paul VI, dans son exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi qui donna une impulsion décisive en ce sens. Il y explique que la piété populaire « traduit une soif de Dieu que seuls les simples et les pauvres peuvent connaître » et qu’elle « rend capable de générosité et de sacrifice jusqu’à l’héroïsme lorsqu’il s’agit de manifester la foi ».

Nous ne pouvons pas non plus oublier comment, devenu pape, Jean-Paul II appela à une évangélisation nouvelle dans son zèle, ses méthodes et ses langages, une réflexion prolongée par son successeur Benoît XVI…

Conclusion

Nous serons donc tous à Rome le week-end prochain pour cette grande joie de cette canonisation. Avec des millions d’autres, je rendrai ainsi tout petitement témoignage à ce géant de saint Jean-Paul II. Saint Jean-Paul II ? Cela me fait tout drôle de l’appeler comme ça, j’ai vraiment l’impression qu’on canonise quelqu’un de ma famille ! Disons simplement Jean-Paul II !

Au passage, ce sera la fête de la miséricorde, qu’il avait lui-même instaurée. La miséricorde, fil rouge de son pontificat. A l’heure où sort au cinéma le 1er film d’évangélisation par la miséricorde (lire ici), comment ne pas en parler ?

Bref, voilà, au fond, pourquoi j’ai appelé mon fils Karol : je lui dois d’être un chrétien engagé dans l’évangélisation, amoureux du Christ, amoureux de ma femme !

Nelson Mandela, veilleur

Nelson Mandela - Veilleurs

Bougies placées devant le portrait de Nelson Mandela lors d’une veillée de palestiniens et de membres de la communauté africaine dans la Vieille ville de Jérusalem, le 7 décembre.

Alors que commence aujourd’hui la cérémonie d’hommage à Nelson Mandela…

Ayant réussi à terminer les 800 pages de la vie de Nelson Mandela avant sa mort, je vous livre ici les quelques notes que j’ai prises de ce document historique sans équivalent (*). Même s’il s’agit d’une autobiographie – la première partie, commencée en captivité, fut recopiée en de minuscules morceaux et enterrée dans la cour de la prison ! – le texte sonne juste et ne tombe jamais dans l’autoglorification. On y trouve au contraire beaucoup d’humilité, parfois même de l’humour, malgré l’aspect souvent dramatique des évènements vécus.  Tout au long du récit, Nelson Mandela sait aussi reconnaître ses échecs, politiques (est-ce utile de se faire emprisonner ?) comme personnels (une vie de famille sacrifiée, deux divorces). Il nous livre aussi une conception très affutée du militant politique, du veilleur de conscience. Il nous parle même d’Antigone !

Le christianisme

Mabida était un chrétien convaincu, il faisait partie d’une association qui enseignait la Bible dans les villages d’Afrique du Sud (p.55). C’est certainement ici, avec ses lectures de Gandhi et son amour de l’Afrique, que Mandela trouve toute l’âme de son combat. Lorsque que le gouvernement afrikaner se déchaînera contre l’ANC, il ne deviendra favorable à la lutte armée que lorsque tous les autres recours auront été épuisés contre un pouvoir sourd et inflexible… Plus tard, lorsque le régime basculera, il prônera non pas la vengeance, mais la réconciliation Noirs-Blancs, qui se concrétisa par la création d’une « commission vérité et réconciliation », élevant la politique à la hauteur de la philosophie et de la psychanalyse.

L’éducation

S’il y a un point sur lequel Mandela insiste dans son livre, c’est bien celui-ci : la nécessité d’une bonne instruction pour qu’un peuple puisse acquérir – ou conserver – sa propre liberté. Lorsque le gouvernement de l’apartheid décide de ne plus subventionner l’enseignement « libre », il raconte sans détour qu’entre toutes les obédiences qui ont charge d’écoles, les seuls réels opposants au projet furent les Juifs, les Assemblées de Dieu – dont il faisait partie – et… l’Eglise catholique !

La presse

Mandela savait lire entre les lignes et se faisait un devoir de lire « l’ennemi » : « Je lisais beaucoup de journaux de toutes les régions, mais ils ne donnent qu’une pauvre image de la réalité. Les informations qu’ils donnent sont importantes pour un combattant de la liberté non pas parce qu’elles disent la vérité, mais parce qu’elles révèlent les préjugés et les préventions à la foi de ceux qui écrivent les articles et de ceux qui les lisent » (p. 218).

La musique

« La politique peut être renforcée par la musique, mais la musique a une puissance qui défie la politique ». Avis aux amateurs !

Aux nantis individualistes

Aux peuples Français, Allemand et Anglais, le grand poète xhosa, Krune Mqhavi, déclara : « Je vous donne la voie lactée, la plus grande constellation, car vous êtes des gens étranges, avides et envieux, vous qui vous querellez dans l’abondance ».

La corruption du système

« Ce riche marchand, prisonnier de droit commun, me racontait des histoires d’escroqueries financières et de corruption parmi les ministres, que je trouvais fascinantes. Cela me confirmait que l’apartheid était un poison qui entraînait une décadence morale dans tous les secteurs » (p.387). Toute ressemblance avec d’autres systèmes politiques seraient totalement fortuite !

La paranoïa de l’adversaire

« Les autorités imaginaient toujours que nous étions en relations secrètes avec toutes sortes de fortes puissances à l’étranger. Mais leurs soupçons reflétaient seulement les craintes d’hommes aux conceptions étroites qui accusaient de leurs problèmes non pas leur politique absurde mais un ennemi qui s’appelait l’ANC. »

Noël et Antigone

« Notre petit compagnie de théâtre amateur jouait à Noël. Ma carrière d’acteur (…) connut un réveil modeste à Robben Island. Nos spectacles étaient ce que nous pourrions appeler aujourd’hui minimalistes : pas de scène, pas de décor, pas de costumes. Nous n’avions que le texte. (…). Je n’ai joué que rarement, mais j’ai tenu un rôle mémorable : celui de Créon, le roi de Thèbes dans l’Antigone de Sophocle. En prison, j’avais lu quelques pièces grecques que j’avais trouvées particulièrement exaltantes. J’en avais retenu que le caractère se mesurait dans les situations difficiles et qu’un héros ne pliait pas, même dans les circonstances les plus dures.(…) Antigone symbolisait notre lutte, en fait, elle représentait à sa façon un combattant de la liberté ; elle défiait la loi parce qu’elle était injuste. »  (pp.550-551)

Le souci de l’unité

Face au succès, l’ANC connu plusieurs « concurrents », donc le PAC, mais qui n’avaient pas l’étoffe et le « nez politique » de l’ANC. Même s’il en eut plusieurs fois l’occasion, Mandela s’abstint toujours de mettre de l’huile sur le feu entre les différents courants : « Je ne voulais pas renforcer les rancœurs qui opposaient l’ANC, le PAC et la Conscience noire. Je ne considérais pas mon rôle en prison comme seulement celui d’un responsable de l’ANC, mais aussi comme celui d’un défenseur de l’unité, d’un conciliateur honnête, d’un médiateur, et dans cette dispute je refusais de choisir un camp, même celui de ma propre organisation. Si je témoignais au nom de l’ANC, je mettrais en danger mes chances de réconcilier les différents groupes. Si je prêchais l’unité, je devais agir comme un unificateur, même au risque de m’aliéner certains de mes camarades. (…). Il était plus important de montrer aux jeunes (…) que la lutte était indivisible et que nous n’avions qu’un ennemi » (p. 588).  Des propos dont pourraient bien s’inspirer un certain nombre de leaders dans d’autres combats pour la liberté et la conscience !

La négociation

Nelson Mandela prend des initiatives alors même que l’adversaire n’a encore rien cédé : « J’ai rencontré Lord Bethell (un ministre contacté à force de persuasion, ndlr) dans le bureau du commandant de la prison, que dominait une immense photo du président Botha. Bethel était un homme jovial et assez gros, et la première fois que je l’ai vu, je l’ai taquiné sur son embonpoint. « On dirait que vous êtes un parent de Winston Churchill », lui ai-je dit en lui serrant la main ; cela l’a fait rire ». Nous avons parlé de la lutte armée et je lui ai expliqué que cela n’était à nous d’arrêter la violence, mais au gouvernement. J’ai réaffirmé que nous visions des cibles militaires, pas la population » (p. 624-6126).

A l’isolement : « J’ai décidé que je n’allais parler à personne de ce que j’avais l’intention de faire. L’ANC est une organisation collective, mais, dans ce cas, le gouvernement avait rendu impossible cet aspect collectif. Je n’avais ni la sécurité ni le temps nécessaires pour discuter de ces questions avec mon organisation. Je savais que mes camarades emprisonnés à l’étage au-dessus condamneraient ma proposition et tueraient l’initiative dans l’œuf. Il y a des moments où un responsable doit marcher en avant du troupeau, partir dans une nouvelle direction, en se fiant à lui-même pour s’assurer qu’il mène son peuple sur le bon chemin. En fin de compte, mon isolement fournissait une excuse à mon organisation au cas où les choses tourneraient mal : le vieux était seul complètement coupé de tout, et ce qu’il avait fait, il l’avait fait seul, en tant qu’individu, pas en tant que responsable de l’ANC. » (p. 634).

Faire le premier pas ? « Je réclamai une réunion avec mes camarades (…). ”En principe, me dit Walter (un des membres de l’organisation, emprisonné), je ne suis pas contre les négociations, mais j’aurais aimé que le gouvernement nous propose des discussions plutôt que ce soit nous qui les proposions”. Je lui répondis que s’il n’était pas contre les négociations par principe, qu’importait qui en était à l’origine ? » (p. 644).

« J’envoyais un mémorandum au Président. A la fin de la lettre, je lui proposais un cadre très général pour les négociations. (…). Je proposais qu’on procède en deux étapes : tout d’abord une discussion pour créer les conditions favorables à une négociation, ensuite les négociations elles-mêmes » (p. 660)

« Je me préparais du mieux que je pu à cette rencontre (…). Je répétai les arguments que m’avancerait le président et ceux que je lui retournerais. Dans chaque rencontre avec son adversaire, on doit s’assurer qu’on donne exactement l’impression que l’on a l’intention de donner » (p. 662)

Bref, ceux qui pensent que jamais aucuns leaders de mouvements de libération n’aient pu entamer d’eux-mêmes des négociations avec leurs adversaires seraient bien inspirés de lire l’avant-dernier chapitre de son livre, intitulé « parler avec l’ennemi ». Mandela explique longuement comment, en proposant des voies politiques médianes, il a pu parvenir à faire fléchir l’« ennemi ». En  prenant toujours les devants, en organisant des rencontres secrètes même avec les pires adversaires du peuple Noir, il parvint, pas après pas, à ses fins politiques. Fin négociateur et fin stratège, ce sont toutes ces qualités qui lui ont permis de mettre fin au régime de l’apartheid.

Pour conclure

Mandela était un génie de la guerre d’influence : puisant dans d’autres combats de libération nationale, il lança, avec l’ANC, toutes sortes d’opérations : grèves, manifestations, « guerre psychologique », campagnes pour sensibiliser l’opinion publique nationale et internationale. Une fois emprisonné, il donnait des communiqués à ses avocats, dans lesquels il condamnait sans discontinuer le gouvernement et les humiliations subies au quotidien par le peuple Noir, sa « politique d’intimidation sélective ». Comme tout bon avocat, il ne laissait jamais passer la moindre erreur de son adversaire… Il a su très tôt négocier pied à pied avec le pouvoir, et ce, depuis ses premiers jours de captivité jusqu’à la fin de l’apartheid (les deux derniers chapitres du livre en sont d’autant plus savoureux, on en jubilerait presque !). En prison, il commença ainsi par la question de la gamèle, des couvertures, du travail forcé, de la possibilité de lire la presse, etc. : il cherchait à améliorer l’ordinaire de ses codétenus dans ses moindres détails et il parvenait, petit à petit, à en faire profiter toute la prison de Robben Island. Il organisait même des formations politiques secrètes à l’intérieur de la prison, avec ses professeurs et ses élèves, tout comme un service de renseignement !

Nelson Mandela fut à l’Afrique du Sud ce que Gandhi – dont il en était un grand admirateur – fut à l’Inde, Martin Luther King aux Noirs Nord-Américains ou Michael Collins à l’Irlande. Comme chacun d’eux, il dût faire des compromis et ne fut que très imparfaitement satisfait des résultats obtenus. Il a tout de même eu la chance de voir le changement de ses yeux.

En se rendant aux obsèques de Nelson Mandela, le monde va honorer la mémoire d’un veilleur. Nous pouvons saluer chez lui ce qu’il avait de meilleur et tous les Veilleurs de France et de Navarre peuvent s’en inspirer dans leurs propres batailles.

Cependant, s’il est devenu une icône de la liberté pour nos contemporains en sacrifiant 27 années de son existence en prison, il faut aussi reconnaître qu’il aurait pu aller encore plus loin dans son combat pour la liberté, en défendant aussi la cause des touts petits dans le sein de leur mère, des femmes qui subissent à vie les conséquences de l’avortement, de toutes celles qui souffrent d’être emprisonnées dans un système où elles n’ont plus vraiment le choix de travailler ou de s’occuper de leurs enfants, et de tous les pauvres, marginaux, qui sont encore privés de leur capacité à choisir le bien, là où se trouve toujours la vraie liberté…

Dieu merci, un Autre a donné sa vie entière – jusqu’à souffrir sa passion pour chacun de nous tous. Puissent nos contemporains reconnaître en Lui le seul véritable sauveur !

* Nelson Mandela, Un long chemin vers la liberté, éditions Livre de poche.

 

Un pape et des homos

Pape François

Ce pape est extraordinaire, comme vous l’avez tous remarqué. « Un pape ne donne pas d’interviews », nous disait-on toujours. Mais ça, c’était avant. Maintenant, nous pouvons lire en entête de cet entretien (à télécharger ici pour le lire à tête reposée) : « Le pape François ne donne pratiquement pas pas d’interview. » Tout est dans ce petit adverbe ! 😉

Avec ce billet, je me contente d’aborder la question homosexuelle, bien que tant d’autres sujets passionnants sont présents dans ce texte génial. Après tout, nous nous sommes tellement penchés là-dessus depuis un an qu’il est bon d’encore écouter le pape, même si nous pouvons être un peu lassés, et cela se comprend…

Il semble d’ailleurs que François se tient très informé de la situation en France. Au coeur de l’été, le 15 août dernier, j’avais soutenu, en tant que co-fondateur d’Homovox, la lettre ouverte de plusieurs catholiques homosexuels publiée simultanément via La Croix et La Vie. (On regrette au passage que peu d’autres journaux aient évoqué cette tribune, alors que nous avons eu la joie de la voir reprise sur Radio Vatican – mais il est vrai qu’elle était également co-signée par Frigide Barjot…). Bref, nous dénoncions alors une certaine “chape de plomb” dans l’Eglise sur cette question et nous réclamions notamment une nouvelle pastorale. (De nombreuses personnes homosexuelles ne contactent-elles pas, par le biais du site Homovox.com, pour nous demander si nous avons un centre d’accueil ?) C’est dire si cet interview, réalisée les 19, 23 et 29 août derniers, est pour nous une réponse directe du pape à notre supplique, seulement 4 jours après !

Ecoutons-le pape : chacun peut noter que François parle d’abord de la nécessité pour les ministres de l’Eglise – et c’est valable pour nous aussi, laïcs – d’ « être miséricordieux, de prendre soin des personnes, de les accompagner comme le bon Samaritain qui lave et relève son prochain. » Le pape ajoute : « Cet évangile est pur. Dieu est plus grand que le péché. » Autrement dit, sommes-nous assez miséricordieux vis-à-vis des personnes homosexuelles ?

Bien-sûr, cela ne veut pas dire tomber dans le relativisme, mais accueillir simplement ces personnes telles qu’elles sont, sans vouloir à tout prix les changer pour les faire devenir finalement telles que nous sommes – ce qui nous arrangerait bien : on n’a pas toujours envie d’être dérangé. Le pape explique aussi que nous devons être capable de « réchauffer le coeur de ces personnes, de dialoguer, de cheminer avec elles, de descendre dans leur nuit, dans leur obscurité, sans se perdre. »

Sommes-nous toujours dans cette attitude quand nous croisons ces personnes sur Facebook ou Twitter ? N’avons-nous pas, parfois, l’exclusion un peu trop rapide ? Entendons-nous bien : en ce qui me concerne, je ne suis pas homosexuel, mais j’ai souvent mal pour eux, à voir comment on leur répond. Hier, un ami me parlait des “pds” dans un de ces textos. Encore ce matin, j’ai vu passer un tweet qui reprenait une blague grivoise en vogue dans la marine à leur sujet… Disant cela, je précise que brandir l’homophobie à tort et à travers – souvent pour des raisons idéologiques et politiques – jusqu’à même stigmatiser les homosexuels eux-mêmes, n’est pas non plus très juste et relève plutôt de l’extrême inverse.

A l’inverse, justement, de ces attitudes stériles, écoutons le pape François qui nous invite à ouvrir de nouvelles routes envers toutes ces personnes (un peu comme ce qu’essaye encore Homovox ?) :

« Au lieu d’être seulement une Eglise qui accueille et qui reçoit en tenant les portes ouvertes, efforçons-nous d’être une Eglise qui trouve de nouvelles routes, qui est capable de sortir d’elle-même et d’aller vers celui qui ne la fréquente pas, qui s’en est allé ou qui est indifférent. »

Précision : l’auteur de cet entretien explosif explique que le Saint Père évoque ici particulièrement les personnes qui vivent des « situations irrégulières pour les Eglise, ou tout du moins des situations complexes, avec des blessures ouvertes (…) et qu’il pense aux divorcés remariés, notamment, mais aussi aux couples homosexuels ».

La question qui vient ensuite est bien celle dont nous parlions plus haut : « Comment faire alors une pastorale missionnaire ? ». Le pape répond :

« Nous devons annoncer l’Evangile sur chaque route, prêchant la bonne nouvelle du Règne (de Dieu) et soignant, aussi par notre prédication, tous types de maladies et de blessures. »

Puis il raconte :

« A Buenos Aires, j’ai reçu des lettres de personnes homosexuelles (*), qui sont des “blessés sociaux” parce qu’elle se ressentent depuis toujours condamnées par l’Eglise. Mais ce n’est pas ce que veut l’Eglise. Lors de mon vol de retour de Rio de Janeiro, j’ai dit que, si une personne homosexuelle est de bonne volonté et qu’elle est en recherche de Dieu, je ne suis personne pour la juger. Disant cela, j’ai dit ce que dit le Catéchisme (de l’Eglise catholique). »

Le pape indique donc ici assez clairement que l’Eglise ne souhaite pas que les personnes homosexuelles se sentent jugées, condamnées par elle ou par les catholiques. Le catéchisme précise d’ailleurs au numéro 2358 : « Les personnes homosexuelles doivent être accueillies avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste » (relire à ce sujet la position de l’Eglise catholique).

Le pape connaissant parfaitement son catéchisme (!), il nous met donc en garde contre une forme d’ingérence dans la vie de ces personnes :

« La religion a le droit d’exprimer son opinion au service des personnes, mais Dieu dans la création nous a rendus libres : l’ingérence spirituelle dans la vie des personnes n’est pas possible. Un jour, quelqu’un m’a demandé d’une manière provocatrice si j’approuvais l’homosexualité. Je lui ai alors répondu avec une autre question : “Dis-moi, Dieu, quand il est regarde une personne homosexuelle, en approuve-t-il l’existence avec affection ou la repousse-t-il en la condamnant ?”.  Il faut toujours considérer la personne ».

Nous avons donc ici une bonne leçon : ne jugeons pas ces personnes. Mieux encore, le pape nous demande d’avoir pour elles de la miséricorde (la spiritualité du siècle!) :

« Nous entrons ici dans le mystère de l’homme. Dans la vie de tous les jours, Dieu accompagne les personnes et nous devons les accompagner à partir de leur condition. Il faut les accompagner avec miséricorde ».

On peut donc ajouter qu’il n’est pas nécessaire de réclamer un certificat de chasteté à ces personnes pour les estimer comme fréquentables. Tant mieux, cependant, pour les personnes homosexuelles qui parviennent à vivre une abstinence et qui peuvent en témoigner ! (Qu’elles se rappellent toutefois qu’elles ne sont qu’au début d’un chemin héroïque vers la sainteté, charge à nous, chrétiens, de ne pas trop souvent les mettre sur les autels).

Enfin le pape prévient (- justement?) :

« Nous ne pouvons pas insister seulement les questions liées à l’avortement, au mariage homosexuel et à l’utilisation de méthodes contraceptives (…), nous ne pouvons pas en parler en permanence ».

Le risque serait en effet de s’enfermer dans un système où nous serions tous des experts sur ces sujets, et où l’accueil de toute personne souffrante, blessée, passerait au second plan de nos priorités, dans notre vie de tous les jours. Or c’est souvent là que commence l’évangélisation véritable, mission première de l’Eglise.

 

(*) Il n’est pas question ici du faux-scoop dont la presse française a parlé en septembre, et pour lequel même le Figaro s’est fait piéger. En effet, cet interview est antérieur et n’a probablement pas eu de retouches depuis sur le sujet. Cependant, quand le pape parle d’un jeune homme à qui il a téléphoné, on peut très bien penser, compte-tenu de ce qu’il vient de dire, qu’il l’aurait fait de la même manière pour une personne homosexuelle : « Un autre exemple récent : les journalistes ont beaucoup parlé du coup de téléphone que j’ai donné à un jeune homme qui m’avait écrit une lettre. Je l’ai fait parce que sa lettre était si belle, si simple. Lui téléphoner a été pour moi un acte de fécondité. Je me suis rendu compte que c’est un jeune qui est en train de grandir, qui a reconnu un père, et alors je lui ait dit quelque chose de sa vie. Le père ne peut pas dire : “Je m’en moque”. Cette fécondité me fait tellement de bien ! »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Réunir la famille pour mieux la promouvoir ?

J’ai souhaité écrire ce billet après avoir lu des articles sur le net au sujet du conflit entre Frigide Barjot et la Manif pour tous. Parce que tout cela m’a profondément révolté et attristé, j’ai voulu vous donner mon sentiment, et parce que je souhaite aussi que nous retrouvions la paix et l’unité. Ce billet comporte deux parties :

  1. Une femme blessée
  2. Nous unir ?

1. Une femme blessée

Une femme est blessée, mais on lui tire encore dessus. Après un coup de poignard dans le dos en pleine négociation pour obtenir de pouvoir participer à ce qui risque fortement devenir un congrès de bien-pensants, voici que des blogueurs faisant autorité se jettent sur sa dépouille, en espérant encore agiter quelque chose. Il est triste de voir des chrétiens se taper dessus en négligeant la parole du Christ, « voyez comme ils s’aiment ». Il est triste de voir assister à la curée de nombreux catholiques qui prennent pour argent comptant tout ce qui est dit et qui s’en font ensuite des gorges chaudes dans les réseaux sociaux, espérant même de nouveaux rebondissements, comme dans une mauvaise série B… Tant et si bien que toutes ces piques font la joie de l’un de nos plus farouches adversaires, Bruno Roger-Petit, qui s’en sert dans un article publié ce soir sur Le Nouvel Obs. De leur côté, les z’amis de Frigide ont choisi de répondre par l’esquive. Ambiance.

Tant que cela marchait, on la suivait, on était derrière elle, comme leader du mouvement. Nous étions même plusieurs millions à la suivre dans le cortège des manifs, sans rien y trouver à redire, puisque nous étions là. Mais il nous faut parfois trouver un coupable à l’échec apparent d’un mouvement auquel on a appartenu. Frigide Barjot est ce coupable idéal, dès lors qu’expulsée, poussée dans ses derniers retranchements, on l’a poussée à dire quelque chose de négatif sur le groupe humain qui l’avait évincé. Alors, pour mieux la lyncher, au cas où elle voudrait revenir, on déterre de vieux dossiers et sur lesquels on ne trouve qu’un seul son de cloche. Bref, un vrai réquisitoire.

Et la prescription, alors ? Est-ce pour la bonne cause ? Qu’est-ce qu’une cause si importante qu’elle est supérieure à la charité ? Nous avons voulu nous battre, au départ, pour des personnes humaines – les enfants et aujourd’hui nous tapons sur une personne. Où est la cohérence ?

On peut reprocher beaucoup de choses à la dame Barjot, mais sous-entendre, par exemple, dans l’acte d’accusation, que c’était pour un enrichissement personnel, c’est un jugement injuste et incongru de ses intentions. Ajouter encore que Frigide Barjot manque d’humilité, et on serait tenté de répondre qu’avec de telles tribunes, elle va progresser drôlement vite… Mais dites voir un peu, les amis, la parabole de la poutre dans l’œil, ça vous dit quelque chose, ou pas ?

Je pose la question : en quoi ces billets font-il grandir les uns et les autres, chacun, personnellement ? Je crois au contraire qu’ils nous font régresser en charité, parce que nous tombons tous dans le jugement, si j’en crois les réactions qui n’ont fait qu’en rajouter… Pour autant, je ne me permets pas de juger des intentions des auteurs de ces tribunes qui ont certainement leur propre histoires et blessures qui conduisent leurs actes (comme tout un chacun).

D’accord, Frigide avait la capacité, mieux que personne, de briser le mur médiatique, tel un marteau-piqueur, en raison de son passé de chroniqueuse showbizienne et des entrées dont elle dispose encore sur les plateaux télé. Tous les acteurs du mouvement, à sa suite, savaient en profiter. Mais la Manif pour tous a finalement décidé de se passer d’elle, avec d’autres. Soit. Dans cette lutte de pouvoir pour prendre le contrôle de la nouvelle boutique, chacun a donc poussé ses pions. Personne, d’ailleurs, n’a voulu d’une dissolution temporaire du mouvement, comme certains cadres l’avaient pourtant proposé. Il y avait-il –  par hasard – quelque chose à récupérer ? Des donateurs, des mécènes, de l’audience, des internautes, que sais-je ? Au fond, peu importe. Nombreux sont ceux qui ont eu connaissance des combats au sein de LMPT et qui n’ont pas répandu sur Internet toutes ces stériles disputes – ni en les approuvant d’un Facebook like. Donc non, définitivement non, au nom du Christ, n’adhérez pas aux pugilats publics, arrêtez de tirer à la kalachnikov sur l’ambulance, s’il vous plaît !

2. Nous unir ?

Aujourd’hui, plutôt que nous diviser et rajouter des tonneaux d’huile sur le feu, nous ferions mieux de nous unir. De nous retrouver. Pour cela, nous devons d’abord comprendre qui nous sommes. Un excellent observateur(*) ayant récemment éclairé ma lanterne, je reprends ici l’intégralité de ses explications, avec son aimable autorisation, pour y ajouter les miennes.

Grosso modo, le mouvement qui s’est levé autour de la Manif pour tous a tourné autour de six familles, chez les cathos :

– les post-maurrassiens (héritiers de l’Action française)

– les post-maurrassiens lefebvristes et assimilés (Civitas, etc.)

– les post-maurrassiens ultramontains (prônant encore la primauté de l’Eglise sur le pouvoir politique, et qui ont fini par être de moins en moins maurrassiens pour être de plus en plus ecclésiaux)

– la vieille France classique aristocratico-bourgeoise de droite en synergie avec l’Eglise de France et différents groupes militants ou associatifs

– les “post-modernes” éclectiques (même s’ils militent pour et contre les mêmes choses) en phase avec les tendances lourdes et d’avenir de la société d’aujourd’hui

– les cathos de gauche.

A cela s’ajoute un fossé de génération. Même si chaque famille comporte ses « jeunes », ces six familles sont issues du passé et il y a en même temps des unités transcourants de générations : 18-30 ans, quinquagénaires, retraités, etc. Or il est indispensable que les 18-30 ans aient toute leur place avec les intuitions propres à la jeunesse – sans se sentir trahis par leurs semblables qui versent parfois dans le vedettariat ! Vivant dans la société d’aujourd’hui et relativement étrangers aux legs conflictuels du passé, ils trouvent intuitivement et spontanément une partie essentielle des “réponses adaptées” car ils sont et le présent et l’avenir. Les Veilleurs en sont un bel exemple, ils renouvellent en profondeur les stratégies trentenaires des vieilles associations. (Mais veillons cependant à ne pas exporter chez eux ces conflits jusqu’aux générations suivantes).

Ces six familles se sont unies sur un refus commun mais restent divisées à cause de leurs origines et par voie de conséquence aussi sur le projet et les choix stratégiques, idéologiques, qu’elles défendent et qui engage l’avenir. Par voie de conséquence aussi, chaque famille tend à considérer le projet des autres comme un danger pour le sien et trouve légitime de tenter de s’attribuer le leadership de l’ensemble du mouvement de protestation pour mieux protéger et faire avancer son propre projet. Outre les hyper-personnalités des uns ou des autres, ceci explique aussi, en partie, les dissensions : avant le conflit avec Frigide, il y avait déjà en germe la lutte de qui prendrait la suite.

Au final, ces six familles sont structurellement et historiquement difficilement réconciliables, bien qu’elles sachent se fédérer sur de grandes causes de façon épisodique (avec des manifs comme combat médiatique utile mais très insuffisant). Elles ont cependant toutes l’avantage de pouvoir agglomérer autour d’elles des segments puissants de la société globale et de répondre de façon différente et complémentaire à l’idéologie des LGBT et du libéralisme libertaire. Pour cette raison, ces six familles sont toutes indispensables dans la perspective d’un mouvement de grande ampleur visant à promouvoir la famille et l’écologie humaine dans son ensemble. Pour cette raison encore, il ne peut y avoir de coordination unique autour d’une seule tête, mais seulement un « pluralisme concerté ».

A partir du moment où un post-moderne pourra difficilement adhérer à un projet bcbg-catho-classique de droite et réciproquement avec tous les autres membres d’autres courants, la seule solution qui reste est ce pluralisme concerté. Frigide Barjot, malgré ses défauts, parvenait tout de même à une synthèse de ces familles. Elle organisait assez naturellement ce pluralisme concerté. Cela avait commencé dès le mois de mai 2012 par des réunions de rassemblement dans les cafés parisiens, où tout le monde était invité… Elle avait ainsi réussi, avec d’autres, cette alchimie compliquée qui fait la force des grands mouvements.

Maintenant qu’elle a été éjectée pour divergence de projet (et incompatibilité d’humeur), la Manif pour tous version II aura plus de difficultés à fédérer très largement. Finalement, tant que le mouvement n’aura pas retrouvé ce pluralisme concerté, il prendra le risque de devenir un ghetto de cathos auto-satisfaits pour finir dans le mur. En effet, comment se remettre en cause si personne ne vient nous déranger ? Qui se reconnaîtra dans ce mouvement s’il est uniforme ? Beaucoup, déjà, sont partis…

Conclusion

La Manif pour tous n’a pas seulement levé une nouvelle armée, elle a aussi réussi à mettre un frein durable aux développements de la loi du mariage dit pour tous tels que le souhaitait le lobby LGBT. Même si les manifs n’ont pas réussi à faire plier le gouvernement, l’opinion a été touchée puisque les Français sont devenus moins favorables au mariage pour tous au moment du vote de la loi. Attention à ne pas faire faiblir ce virage à cause de l’image négative que l’on donne aujourd’hui. Regardons vers l’avant plutôt que de nous regarder le nombril, cela risque de coûter cher à des enfants !

Maintenant, qu’allons-nous en faire ? Oserons-nous, aussi, nous remettre en cause ?Nous pouvons aujourd’hui nous poser la question de l’avenir de la Manif pour tous : peut-elle se relever de ce conflit, est-elle sur la fin et dans ce cas saura-t-elle laisser toute la place à d’autres mouvements peut-être désormais plus pertinents, comme par exemple les Veilleurs ?

Nous pouvons encourager les nouveaux combattants à dépasser rancœurs et clivages pour travailler en profondeur, labourer le terrain sur le long terme – comme le font nos adversaires – et retrouver le courage de l’engagement politique.

Nous pouvons aussi continuer d’arroser ce qui a été semé autour de la Manif pour tous, et qui, manifestement, a porté du fruit. Comme par exemple à travers l’accueil des adoptés à travers les Adoptés pour l’enfance, ou celui des personnes homosexuelles avec Homovox.

Nous pouvons encore et surtout former les nouvelles générations aux combats de demain. Cela commence dès l’enfance, par des écoles par exemple.

C’est à cet immense et passionnant défi que nous devons dès maintenant consacrer nos efforts.

 

(*) Bruno M.

 

Veilleurs - Concorde

Deux prophéties pour la France

Veilleurs

Avant que viennent les vacances et que je reste un long moment au vert, j’étais tombé sur deux textes étonnants dans un petit livre de “prophéties” offert par ma chère belle-mère. J’en avais un peu parlé sur Twitter et certains d’entre vous semblaient intéressés : je les publie donc ici. Bien sûr, ces prophéties ne sont pas « autorisées ». Mais, dans un style tout prophétique, elles nous parlent d’un mouvement sans chef, qui agit avec solennité. Ces jeunes marchent à travers le pays, ils se rassemblent en silence sur les places… Bref, vous allez voir, c’est très étonnant, même la Concorde est évoquée ! Toute coïncidence avec des personnes réelles serait purement fortuite, surtout au lendemain de la grande marche des Veilleurs et de leur magnifique veillée, samedi, à Paris !

1. Prophétie « Les jeunes atteignent l’Europe »

« De nombreux personnes ont prié pour les champs de bataille français, ceci est tout à fait juste. Le Seigneur n’oublie jamais les lieux où le sang a été répandu. Je voyais les cimetières du Nord de la France, si bien entretenus. Chaque croix blanche portait des coquelicots. Mais lorsque j’ai regardé à nouveau, on aurait dit qu’il y avait une armée en marche. On aurait dit que c’était une armée de jeunes en route, des jeunes gens et des jeunes filles. Ils prenaient leur tâche très au sérieux, mais en même temps ils étaient remplis d’une grande joie. Ils traversaient la mer jusqu’en France où ils se rejoignaient pour former cette armée. Ils marchaient dans les cimetières et retiraient les croix. Au début, cela semblait plutôt choquant, mais chaque jeune personne prenait une croix blanche et la posait sur son épaule, avant de marcher à travers l’Europe.

Je n’ai pas vu un responsable qui en avait la charge, ni aucun ordre donné. On ne parlait même pas et pourtant chacun savait ce qu’il faisait et pourquoi il le faisait. Ils semble qu’il y avait une valeur rédemptrice dans cet acte. Ces vies perdues dans le passé allaient être honorées d’une manière qu’aucun homme ne pourrait faire. Ces vies allaient continuer à avoir de la valeur dans le futur pour de nouvelles batailles.

Il y avait un sens merveilleux : le Seigneur rachetait le temps et l’apparence de gaspillage de vies par le passé. Dans cette scène tout à fait remarquable, il y avait de la joie et de la solennité. Je n’ai pas pu voir jusqu’où les jeunes allaient. Il y avait plusieurs destinations en Europe et je savais qu’ils iraient dans ces lieux et qu’ils feraient plus que ceux qui avaient donné leurs vies dans les deux guerres mondiales. La tâche serait plus qu’achevée. »

Anne G. (Etats-Unis, mai 2000)

> Une interprétation : ces croix, est-ce toutes celles, grandes ou petites, que nous portons au quotidien ? Sont-elles aussi les humiliations d’un pouvoir autiste et autoritaire ? Sont-elles encore les petits sacrifices que nous offrons à Dieu patiemment, dans le secret de nos cœurs ? Que pouvons-nous d’ailleurs offrir au Christ, si ce n’est notre choix de nous mettre en route, à notre tour et à sa suite, au chevet de notre pays malade de lui-même ? Offrons-lui notre humble prière et notre existence toute entière, mettons-le définitivement premier dans nos vies.

> Une autre signification : c’est une invitation à prier nos frères défunts de venir en aide à la France, car leur intercession est très puissante. Ici cette prophétie rejoint celle – authentique – de Marthe Robin selon laquelle la France se relèverait en criant vers Marie. En effet, nous pouvons prier la “spécialiste” des âmes du purgatoire – j’ai nommé Notre Dame de Montligeon – pour lui demander dans cette prière officielle de leur obtenir « la joie qui surpasse tout désir » et de faire de nous, pauvres pèlerins de la terre, « des apôtres de l’Espérance semblables aux veilleurs de l’aube ».

Veilleurs - Concorde

2. Prophétie « Des milliers de gens de beaucoup de nations prient pour la France »

« Dans mon sommeil, la nuit du 2 février, j’ai eu une vision inimaginable. Je me tenais dans les jardins du Louvre, à côté du Petit Arc juste après la Pyramide. De là, j’ai regardé en bas sur les jardins, à travers la place de la Concorde et l’obélisque, jusqu’au rond-point des Champs-Elysées et l’arc de triomphe. C’était un beau jour très clair.

Ce que j’ai vu était étonnant : des centaines de milliers de d’hommes et de femmes se tenant, chacun épaule à épaule. Il n’y avait aucun espace entre eux. Ils couvraient tout le terrain imaginable depuis le quai de la Seine. Ils venaient de toutes les nations, hommes, femmes et enfants, me faisant face. Ils se tenaient debout et ne bougeaient pas, comme si leurs pieds étaient plantés là où ils se tenaient. Leurs visages brillaient et ils ne se tournaient pas vers la gauche ni vers la droite.

J’ai demandé au Seigneur : « Protestent-ils ? » comme ils le font souvent ! « Sont-ils ici pour écouter l’Evangile ? ». Sa réponse m’a étonné : « Non, ils sont ici de chaque pays, pour se tenir dans la prière pour cette nation. »

Ce n’était pas les habitants de Paris que j’ai vu. C’était les intercesseurs. Il a amassé ses guerriers pour se tenir ici et prier. »

Mary A. (février 2001)

> Une interprétation : Le Seigneur avait bien prévu les Veilleurs. Ces veillées méditatives ont certainement une grâce d’intercession. Du reste, bien au delà des rassemblements physiques, nous pouvons aussi proposer au monde entier de prier pour nous, avec nous. Alors les croyants de tous les pays se tiendront à nos côtés pour veiller sur la petite flamme de l’Espérance. Et rien ne sera plus comme avant.

Bonne rentrée à tous !

 

Une Grande Armée est née

 

Et vous, où étiez-vous ? La question ne cesse de revenir, entre grognards. Chacun souhaite redire, comme après Austerlitz : « j’y étais ». Car nous le raconterons un jour à nos petits-enfants : le 24 mars 2013, à Paris, est née une Grande Armée pacifique !

Pour ma part, j’étais au niveau du podium. J’y ai vu beaucoup de choses : l’avenue de la Grande Armée pleine à craquer dès 15 heures, obligeant le collectif à délester sur l’avenue Foch et les avenues adjacentes. J’ai vu aussi la place de l’Etoile se remplir tranquillement sous les yeux des CRS avant qu’un piège ne se referme. J’ai vu encore le bras armé du gouvernement provoquer ceux qui déployaient une bannière du « Printemps français » (pourtant non-autorisée par la Manif pour tous), celle-ci finissant par être rangée miraculeusement, à coups d’eau bénite…

Au sujet des débordements

Constatons-le d’abord : la Manif pour tous n’a rien à voir avec les événements des Champs-Elysées, elle était responsable d’un autre secteur. Dès que l’interdiction de manifester sur la plus belle avenue du monde était tombée, la Manif n’a plus laissé passer un seul appel à aller sur les Champs-Elysées, contrairement à ce qu’a affirmé lundi le ministre de l’Intérieur Manuel Valls au micro de RTL (« depuis plusieurs jours, malgré les interdictions, les organisateurs ont appelé à manifester sur les Champs-Elysées »). Du reste, c’est lui qui a contredit le Préfet de Police, lequel avait dit aux organisateurs qu’il est d’accord pour ouverte la place de l’Etoile.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le pouvoir a cherché l’affrontement

Dimanche, place de l’Etoile, la police a  d’abord laissé passer des manifestants. Puis, suite à des ordres venus d’en haut – Manuel Valls venait d’apprendre via Itélé que la place était finalement envahie ! – les CRS ont fermé la nasse et ont gazé tous ceux qui étaient là, enfants compris. Un petit groupe de personnes, arrivant d’ailleurs et n’étant vraisemblablement pas des manifestants, cherchait en découdre. Les volontaires du service d’ordre de la Manif ont alors fait reculer la foule et l’ont contenue d’une manière exceptionnelle pour que le « bouchon » entre la Grande Armée et la place de l’Etoile n’éclate pas. Un de mes amis volontaires, à la carrure de rugbyman, s’est tout de même fait gazé 6 fois dans la mêlée. En parlant avec un policier, ce dernier lui a dit ne pas comprendre les ordres reçus de ses supérieurs, qui allaient contre les méthodes habituelles pour contenir une foule. En effet, cette façon de faire n’est jamais employée d’habitude, car elle exacerbe inutilement les tensions. Place de l’Etoile, ce sont donc les volontaires de la Manif qui ont remis de l’ordre, au contraire des forces de police qui ont sciemment mis de l’huile sur le feu. Dans quel but ?

Le pouvoir est responsable de ces tensions

Rappelons que samedi, le ministère de l’Intérieur tablait sur 100.000 personnes, tout en sachant, par les responsables de la Manif, qu’il y avait autant de cars venus de province que le 13 janvier, le double de TGV spéciaux, et une hausse de 35% du co-voiturage… Est-ce un manque de confiance, un aveuglement, ou ont-ils fait semblant d’ignorer l’ampleur de la manifestation ?

Sur son blog, le député Lionel Tardy s’indigne : « la Préfecture de police a sous-estimé le succès de la manifestation : un CRS m’a confié qu’il était attendu 100.000 manifestants tout au plus… résultat, une avenue de la Grande Armée inadaptée pour une manifestation statique de cette importance, qui a rapidement été saturée ».

Quoi qu’il en soit, dimanche, en début d’après-midi, constatant l’ampleur de la manifestation, Valls aurait dû assumer son erreur et accepter d’ouvrir les Champs-Elysées. Cela aurait évité, en de nombreux points, à des policiers de se trouver en tout petit nombre face à la foule, et donc presque obligé de faire usage de gaz lacrymogène, dont on distingue, au passage, deux catégories. Cela aurait donc évité de nombreux accrochages. Comme celui-ci : où comment faire pour que ça se passe mal quand on est CRS, sans jamais se retirer. Mais les ordres, ce sont les ordres ?

Comment aussi ne pas comprendre aussi l’exaspération de nombreux manifestants venus de trois loin et « parqués » dans les autres avenues comme l’avenue Foch, sans sono ni écrans géants, faute d’avoir pu en mettre partout ? Face à eux, l’Etoile ressemblait à un camp retranché, comme une provocation de plus du gouvernement.

De plus, des CRS ont fait des incursions dans la foule pour la provoquer, à coups de gaz lacrymo (voir cette vidéo vue 200.000 fois). Rappelons tout de même que le 13 janvier, il n’y avait eu aucun incident ! Et que dire de ces enfants gazés ? Ceci est absolument scandaleux ! A quand les lance-patates « Cougar » ?

Il apparaît désormais clairement que Valls a donné l’ordre de fermer l’Etoile une fois que la place était envahie, fermant ainsi le piège sur les manifestants, tout en sachant qu’il y avait des enfants parmi eux. Cela mérite bien une enquête parlementaire telle que l’a réclamée le collectif de la Manif. Même si cette zone ne concerne pas la Manif, il demeure encore flou qu’après 18 heures, les autorités aient sauvegardé une zone tampon de 100 mètres sur les Champs-Elysées, devant le Mac Donald’s, alors que le bas de l’avenue était déjà envahi…

Combien étions-nous vraiment ?

Le général Bruno Dary et ses équipes ont compté un rassemblement statique de 1,4 million de manifestants. Ce comptage a été fait en fonction des paramètres suivants : 3 personnes par m2, en calculant la surface de l’avenue de la Grande Armée, l’avenue Foch, la Porte Maillot et l’avenue Charles-de-Gaulle à Neuilly, ces axes étant pleins à 100% comme le montrent toutes les photos. N’importe quel Français peut faire le calcul avec un plan ou une carte Google, c’est indiscutable. Par ailleurs, le chiffre de 1,7 million circule, émanant d’un mystérieux général de l’armée de Terre… mais qui, d’après un de mes contacts, existe vraiment !

Quelle stratégie, aujourd’hui ?

Pour avoir vécu les évènements de près, je peux vous dire que la Manif pour tous est, plus que jamais, extrêmement déterminée à faire échec à ce projet inhumain et antisocial du ‘mariage’ prétendument pour tous. Elle ne peut le faire que dans un esprit pacifique. Pour ne pas être interdite, et parce que nous, les opposants, nous sommes républicains, la Manif ne peut que rester dans cette légalité. C’est comme cela que ce grand mouvement populaire initié il y a 6 mois par Frigide Barjot et ses amis peut continuer d’exister en toute légitimité. Légitimité auprès des autorités, des élus, de la société civile, des médias, pour chacun d’entre nous, manifestants de la première comme de la dernière heure.

Si, comme Valls l’a encore prétendu hier à l’Assemblée nationale (« les organisateurs n’ont pas respecté les consignes »), La Manif pour tous avait invité à manifester sur les Champs-Elysées dans l’illégalité, nous aurions été bien moins à venir : beaucoup seraient restés chez eux. Et si, d’un mot au micro, Frigide Barjot avait appelé depuis le podium à se rendre sur les Champs-Elysées, nous n’aurions pas eu 6 mises en examen, mais des centaines.

Ne soyons pas naïfs : les ordres donnés aux CRS ne sont pas plus compatissants envers nous qu’en mai 68 : nous aurions alors eu des milliers de hommes et de femmes, d’enfants, gazés ou inondés par les canons à eau qui stationnaient dimanche dans les rues adjacentes. Cela aurait été totalement irresponsable de la part des organisateurs de la Manif que de jeter les manifestants dans un tel guêpier. Voilà donc à quoi mènerait un « printemps français » désolidarisé de la Manif, tombant dans une inégalité inappropriée : nous n’aurions obtenu que la fin de notre mouvement. Nous serions tombés dans la clandestinité. C’est précisément ce que souhaite Valls et ses amis !

La Manif doit donc éviter ce piège dans lequel voudrait l’enfermer le gouvernement, qui cherche à la faire passer pour « catholique de droite et homophobe » alors qu’elle rassemble au contraire des musulmans, des Juifs, des athées, des homosexuels, des bisexuels, des radicaux de gauche et même des trotskystes, comme on l’a vu dimanche !

 

 

 

Par ailleurs, la Manif a toute légitimité pour se séparer d’un de ses porte-paroles. N’est-il pas contre-productif d’intervenir pour demander par la réintégration d’un membre du collectif qui se serait désolidarisé de la stratégie commune ? Tout le monde l’a bien compris aussi : il y a une très grande différence entre émettre des critiques en interne sur telle ou telle option et les diffuser sur la place publique. Dans ce dernier cas, elles serviront nos adversaires, ce qui est dommageable pour la cause que nous défendons tous. Que voulons-nous ? Le succès de notre entreprise ?

Peut-être que vous vous dites cependant : « en mode bisounours, les autorités s’en foutent, ils nous parquent comme des bêtes et ne daignent même pas nous compter ». A ceux qui n’ont pas trouvé les discours assez musclés, dimanche, voici de quoi tout revoir. Vous constaterez que le ton est monté d’un cran. De plus, c’est une erreur de croire que le pouvoir se moque de cette mobilisation. Ils savent combien nous sommes : le bon chiffre (!) était lundi matin sur le bureau du Président. Tous les indicateurs montrent aussi que lui et son gouvernement vivent la peur au ventre de perdre le pouvoir. Ils n’en peuvent plus. C’est une pression permanente de savoir qu’à chacun de leur déplacement, un comité de la Manif pour tous les accueillera avec bannières et slogans. Cela a été le cas dans de si nombreux endroits, pour un nombre grandissants de ministres ou de porte-paroles du gouvernement ! Et c’est loin d’être terminé : à qui le tour ? ☺

Le sentiment de ras le bol est général, mais ne perdrons pas le cap : faire échouer ce projet de changement de civilisation. Nous ne sommes plus à l’époque où Napoléon pouvait prendre le Parlement par la force et instituer le Consulat. Il n’y à qu’à voir dimanche comment l’Elysée était un véritable donjon, une tour d’Ivoire dans laquelle s’était enfermée le Président. Si certains veulent aller au martyre (normalement, ce genre de chose, on le reçoit sans le demander !), voire même parfois avec leurs enfants, c’est leur choix, qu’ils assument. Ce n’est pas mon cas, et cela ne le sera jamais : je resterai dans la légalité, comme y invite la Manif.

Quels sont les fruits de la mobilisation ?

Cette petite rétrospective vidéo nous permet de nous rendre compte du chemin parcouru.

Pour ma part, jamais je n’aurais cru que nous aurions pu rassembler en si peu de temps 2 manifestations de plus d’1 million de personnes. C’est un énorme succès auquel chacun d’entre nous a participé. Ne laissons personne nous dire que ces manifs n’effraient pas le pouvoir et ne servent à rien ! Ne laissons personne nous ravir la joie de ces grands moments fraternels !

Le fruit le plus visible : tous ces jeunes qui se sont mis en route et qui marchent, main dans la main, avec une force invisible. Ils sont invincibles ! Dimanche, le QG de la Manif ressemblait d’ailleurs à une ruche des JMJ, avec un jeune derrière chaque porte.

D’autre part, le vent médiatique commencent à tourner. A l’étranger par exemple. Mais aussi en France : ce matin, c’était France info qui trouvait particulièrement percutant le slogan “on veut du boulot, pas du mariage homo“.

Du reste, même si cela ne se voit pas toujours, chaque jour apporte son lot de petits bouts de terrain gagnés sur l’adversaire. Vous pensiez être isolé dans votre coin, mais désormais, vous n’êtes plus seul. Cela aussi, c’est déjà une victoire !

Et maintenant ?

Nous devons continuer à nous rassembler autour de la Manif et de celle que les médias appellent depuis longtemps la « tête du file » du mouvement, Frigide Barjot. Je l’ai déjà défendue sur ce blog et que je continuerai de le faire tant qu’il le faudra, même si certains l’attaquent encore. Je vous assure, avec la plus grande force, qu’elle et ses équipes sont plus déterminés que jamais. Elle nous mènera à la victoire ! Adressons-lui un message amical de soutien, de confiance, elle en a bien besoin.

Vous avez cependant un doute sur un collectif en particulier ? Regardez la liste des associations coordinatrices de la Manif établie sur son site officiel, tout le reste sert d’autres objectifs ! Peut-être que vous vous demandez aussi : « à quoi ça sert, tout ça ? ». Regardons alors le chemin parcouru depuis le début de cette mobilisation unique. Aurions-nous imaginé cela il y a 6 mois à peine ? Regardez aussi ce qui arrive si l’on ne fait rien, c’est pas folichon. D’ailleurs, dans le cadre de la loi sur la refondation de l’école (réforme Peillon), un amendement a été déposé et voté le 20 mars pour rendre obligatoire la théorie du genre dès l’âge 6 ans…

« Allo, Président ? »

Aujourd’hui, François Hollande n’a plus le choix. Son peuple l’a coincé. S’il laisse courir le projet de loi, notre mobilisation va prendre encore plus d’ampleur. Nous aurons alors à rester tous très soudés, à garder la tête bien froide (1), car ne sera pas forcément toujours très drôle (2). Nous aurons notamment sur notre chemin Christiane Taubira, qui voudra nous sabrer avec un grand sabre, comme elle a l’a dit à Libération il y a une semaine. Rassurez-vous cependant : partie s’exiler au Sénégal, comme une fuite à Varennes, elle a pour le moment disparu des écrans radars… sauf dans le Canard, qui raconte comment elle fait le vide autour d’elle. Et le plein des manifs, oserais-je rajouter.

Les trois options du Président

François Hollande a trois options devant lui pour sauver son mandat :

1. Ouvrir un référendum sur le ‘mariage’ prétendument ‘pour tous’
2. Saboter discrètement le projet au Sénat (on lui fait confiance pour cela)
3. Ne pas promulguer la loi une fois votée (on espère ne pas en arriver là).

Dans tous les cas, il n’aura plus qu’à contenir une « poignée » de militants LGBT, pour reprendre les mots d’Arnaud Montebourg, et sans devoir utiliser – cela va de soi – une seule goutte de gaz lacrymo. Ses propres troupes se sentiront alors soulagées, elles pourront retourner travailler sans comité d’accueil de la Manif. Mais si, par hasard, François Hollande s’entête, ce sera la preuve qu’il n’est qu’une marionnette aux mains d’intérêts étrangers. Nous aurons alors doublement raison de ne rien lâcher !

 

THE END… pour le moment du moins. 🙂

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A ne pas manquer :

– Venez accueillir François Hollande demain soir jeudi
– La manif est prête à recommencer
– La violence n’est pas toujours du côté que l’on pense…

(1) C’est le moment de lire un petit livre : Subversion, de Roger Muchietti (2) Un peu d’humour (le panier à salades) : 10 bonnes raison d’interdire la Manif pour tous

« Quand il y a des milliers et des milliers de citoyens, jeunes ou moins jeunes, mobilisés, à quoi sert d’attendre la prochaine manifestation ? Il suffirait d’un mot, un seul, que le pouvoir hésite à prononcer (…). Quand on a fait une erreur, il faut savoir l’effacer »

(François Hollande au Premier ministre lors des manifestations contre le CPE, en 2006)

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Message de la Manif au manifestants suite à la manif du 24 mars

Merci à tous et à toutes !

Un immense bravo pour votre mobilisation ! Merci mille fois de vous être déplacés si nombreux, d’avoir enduré la fatigue de longs voyages et l’attente dans les avenues bondées.
Une nouvelle fois ceux qui essayaient de vous décourager et de faire taire votre voix se sont trompés. Ils annonçaient 100.000 manifestants. Mais cette fois personne ne peut nier que vous étiez 1.400.000 personnes ; les médias, les télévisions ont relayé partout les images extraordinaires de votre foule immense.

Vous n’êtes pas venus pour rien. Vous avez été plus calmes et plus dignes que ne l’est le pouvoir sourd, crispé et violent avec ceux qui sont pacifiques, ouverts au dialogue et respectueux des droits.
C’est votre détermination, celle du Peuple de France, qui fera plier le pouvoir.

Le ministère de l’intérieur a essayé de saboter notre rassemblement du 24 mars en nous obligeant à changer de parcours 3 jours avant. Mais grâce à une organisation exemplaire, des volontaires formidables et à votre calme tranquille, aucun heurt ni aucune dégradation n’ont eu lieu sur le parcours.

Pourtant en fin d’après-midi, en haut de l’avenue de la Grande Armée et de l’avenue Foch, à la limite de notre rassemblement, des manifestants pacifiques ont été victimes de jets à bout portant de gaz lacrymogènes de la part des forces de l’ordre. Ils n’ont épargné ni les enfants, ni les personnes âgées. Des élus et des journalistes ont aussi été touchés. Ils apportent tous un témoignage irréfutable.

Nous sommes très profondément choqués. Cette violence est totalement inqualifiable et injustifiable. Monsieur Manuel Valls en est pleinement responsable.

Nous pensons à tous ceux qui ont été touchés. Nous souhaitons les réconforter ; nous vous assurons de tout notre soutien. Vous avez montré beaucoup de courage, et nous vous promettons que ces agissements ne resterons pas impunis et que notre détermination ne faillira pas.

Nous nous battrons tant que le Président n’aura pas retiré le projet de loi Taubira.

On ne lâche rien !!!